Les années 1970 : la grande épopée des montres LipENCHÈRES. Les 26 et 27 mars, à Besançon, la maison de ventes Astrid Guillon disperse une importante collection de 550 garde-temps dont 275 références de la manufacture bisontine mettant à l’honneur les seventies, période phare de la griffe française.
Par Arthur Frydman
Publié le 17/03/2025 à 11h12
À gauche, LIP Secteur Heures Sautantes Rétrograde, dite LIP Sectora, réf. 43647, vers 1972 (lot 106, 800-1200 euros). À droite, LIP, by Roger TALLON, réf. 43756, 1975 (lot 166, 1300-1800 euros). © Astrid Guillon Maison de ventes aux enchères
Les nostalgiques de LIP, marque française pionnière en termes d'innovations lors de son apogée dans les années 1970, vont être servis à l'occasion de cette vente-fleuve orchestrée les 26 et 27 mars à Besançon, sous le marteau de la commissaire-priseur Astrid Guillon. Mais, au-delà des vieux briscards, connaisseurs avisés de LIP, l'événement a été pensé comme une opportunité pour les jeunes générations et les néophytes de découvrir l'histoire horlogère de LIP. Également, de remettre un coup de projecteur sur cette dernière, la marque étant surtout plébiscitée dans les pays asiatiques, mais pas suffisamment en France.
La vacation balayera tout le patrimoine et le catalogue historique LIP, qui se concentre notamment entre 1973 et 1976, une période bien précise que les collectionneurs pourront (re)découvrir. Une époque très appréciée aujourd'hui, qui revient sur le devant de la scène, surtout chez les jeunes avec des modèles battant au rythme de mouvements mécaniques, automatiques et électromécaniques. La vente sera surtout l'occasion d'acquérir des pièces mythiques de la maison française, le tout à des estimations prudentes et raisonnables.
LIP Secteur Heures Sautantes Rétrograde, dite LIP Sectora, réf. 43648, vers 1972 (lot 109, 500-700 euros)© Astrid Guillon Maison de ventes aux enchères
Les 275 montres vintage du catalogue ici mises à l'encan sont issues d'une seule et même collection, rassemblée pendant une trentaine d'années par un passionné. Elles sont estimées entre 50 euros pour certaines montres de poche à tachymètre des années 1920 et jusqu'à 2 500 euros pour des itérations animées par le célèbre Calibre électromagnétique R27 de LIP. Autrement dit, des prix incitatifs pour tous les budgets.
LIP et l'âge d'or des designers stars
Il faut bien se rappeler que la manufacture, fondée en 1867 à Besançon par Emmanuel Lipmann, a été très populaire et novatrice. C'est sûrement la marque horlogère française la plus connue dans le monde. À l'époque, une LIP en or mécanique ou automatique était plus chère qu'un Daytona Paul Newman de Rolex, imaginez donc… Sous Fred Lip, charismatique patron de la maison, LIP devient le premier horloger de France, employant 1 500 salariés et produisant près de 300 000 montres par an.
La marque est une des plus avancées au niveau social – crèches, cantine gratuite – et présente l'un des premiers réseaux de distribution, une petite révolution dans le monde de l'horlogerie d'antan. Il ouvrira même un bureau de distribution à Genève avec des cadrans estampillés au nom de la ville suisse afin de concurrencer des marques telles qu'Omega, Jaeger-LeCoultre ou Universal à l'instar de divers modèles inédits à retrouver dans cette vente. Un succès qui n'empêchera pas l'arrivée d'une tempête pour LIP qui, à partir de 1973, sera le théâtre d'un conflit social d'ampleur nationale et sans précédent, conduisant à une liquidation de la boîte, cela dans un contexte de crise avec l'arrivée du quartz.
Néanmoins, avant ces sombres épisodes, Fred Lip, avant-gardiste dans l'âme, se lança dans l'aventure du design dès 1968 en faisant appel au prince François de Baschmakoff, grand coloriste connu pour ses dessins dans les magazines de mode, qui créa de nombreux modèles mécaniques à heures sautantes ou dont la lecture de l'heure se fait par guichet décentré à disques tournants. En 1971, Fred Lip passa la main. C'est Claude Neuschwander, un ancien homme fort de Publicis, qui devient directeur général de la marque en 1974. Ce dernier, habile communicant, souhaite faire entrer la maison, alors en mauvaise posture, dans une nouvelle ère.
1975 signe le sommet des années design de la maison française. Claude Neuschwander annonce une nouvelle collection, et, pour la première fois de l'histoire de l'horlogerie, les fines fleurs du design industriel élaborent des garde-temps en utilisant des matériaux issus de l'aéronautique, du rail ou de l'automobile. Et pas n'importe lesquels. Des LIP, le fleuron national. Carte blanche fut donc donnée à quatre designers stars de l'époque. Marc Held et ses Skipper en acier pour femmes à la boîte sandwich, très prisée au début des années 1970 à l'image des petites montres rondes en acier de la série Galaxie, dessinées entre 1975 et 1976 par Rudolf Meyer.
Également Michel Boyer et sa mythique série de quatre montres monobloc en plastique – dix ans avant le concept de Swatch – représentant les quatre saisons. Enfin et surtout, Roger Tallon, artiste majeur du design industriel, à l'origine des dessins du train Corail, du TGV Duplex et de l'Eurostar qui collabora en 1975 avec LIP pour la célèbre collection Mach 2000. Sa montre phare ? Le chronographe Dark Master avec ses trois boutons-poussoirs aux couleurs primaires et au boîtier asymétrique, flop commercial à l'époque, mais très recherché aujourd'hui, d'autant plus que le modèle a fait son entrée dans plusieurs grands musées de design à travers le monde entier.
L'intégralité de ces modèles est visible sur le site Internet de la maison de ventes Astrid Guillon ainsi que durant l'exposition publique, du samedi 22 mars au mardi 25 mars à la salle des ventes 3, rue de la Liberté 25000 Besançon. La vente se tiendra les mercredi 26 et jeudi 27 mars à partir de 14h00 ainsi qu'en live sur Drouot.com et interencheres.com.
Les années 1970 : la grande épopée des montres LIP